Un très ancien primate retrouvé à Messel (24/5/2009)

Franzen J.L., Gingerich P.D., Habersetzer J., Hurum J.H., von Koenigswald W. and Holly Smith B., 2009. Complete primate skeleton from the Middle Eocene of Messel in Germany: morphology and paleobiology. PLoS ONE 4(5) (article disponible ici)

Messel est un site fossilifère allemand mondialement connu, classé patrimoine mondial de l'UNESCO en raison de l'importance des découvertes qui y ont été faites. C'est en un effet un site incontournable concernant l'Eocène (-57 à -36 Ma), et il a livré de très nombreux fossiles extrêmement bien préservés : individus complets, empreintes de fourrure et de plumage, contenu stomacal. Il est notamment d'une importance cruciale pour comprendre l'évolution des mammifères. Messel était à l'époque une forêt de type tropical humide entourant un lac d'origine volcanique.

En 1983, le fossile d'un petit primate vieux de 47 Ma fut trouvé à Messel. Brisé en 2 morceaux vendus séparément, ce n'est que récemment que les deux moitiés ont été réunies et étudiées par des paléontologues. Ceux-ci l'ont décrit comme une nouvelle espèce de primate à mi-chemin entre les Strepsirrhiniens (tels les lémuriens) et les Haplorrhiniens (autres primates regroupant la majorité des singes actuels, depuis les tarsiers jusqu'à nous). Darwinius masillae, c'est son nom, est le primate fossile le plus complet jamais trouvé.

holotype de Darwinius masillae (PMO 214.214)    reconstitution de Darwinius masillae, (c) Bogdan Bocianowski

Darwinius masillae, en vue latérale droite (spécimen PMO 214.214). Fait rare en paléontologie, l'individu est presque parfaitement complet. On voit très clairement le pelage, et le contenu stomacal a également été préservé. A droite, une reconstitution de Darwinius (Photos issues de Franzen et al., 2009)

Darwinius avait une face assez courte et de grands yeux, peut-être était-il nocturne. Ses doigts, aux phalanges allongées, étaient munis d'ongles et non de griffes. Il n'avait pas de griffe de toilettage, qui est propre aux Lorisiformes. Sa queue était longue mais non préhensile, elle pouvait être utilisée pour conserver son équilibre lors des déplacements et des sauts. Le pouce et l'hallux (gros orteil) étaient opposables. Le spécimen ne porte aucune trace de baculum, et il devait donc s'agir d'un individu de sexe féminin. Des restes de fruits et de feuilles ont été découverts au niveau du tube digestif. Le contour de sa silhouette et de sa fourrure est resté imprimé, montrant que Darwinius avait des cuisses musclées et de petites oreilles externes.

Darwinius était un quadrupède agile et vivait dans les arbres. Il n'était pas particulièrement spécialisé. Le squelette appartenait à une petite femelle âgée d'environ 9 à 10 mois, qui était sevrée et commençait à se nourrir seule de la végétation environnante. Son corps a coulé au fond du lac peu de temps après sa mort, et celui-ci ne porte aucune trace de prédation ou de charognage.

main de Darwinius masillae Photo et radiographie des mains et des poignets de Darwinius masillae. Le poignet droit (en bas) porte les traces d'une excroissance osseuse : Darwinius a souffert d'une fracture à l'extrémité de son bras droit (Photo issue de Franzen et al., 2009)

 

Photo et radiographie du pied droit de Darwinius masillae. Le gros orteil était opposable, et la griffe de toilettage est absente du doigt II (Photo issue de Franzen et al., 2009) pied de Darwinius masillae




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