Un pas en plus dans la compréhension de l'évolution des poissons plats (29/07/2008)

Friedman M., 2008. The evolutionary origin of flatfish asymmetry. Nature 454: 209-212

Les alevins des poissons plats (sole, plie, turbot, limande, etc.) ressemblent tout à fait à ceux des autres poissons. Cependant, un de leurs yeux va migrer au cours de leur croissance pour aller rejoindre l'autre oeil, et donner cette apparence si particulière caractéristique de la famille des Pleuronectidés : une face porte les deux yeux, l'autre est complètement aveugle. La migration de l'oeil est variable selon les espèces, et parfois entre individus au sein de la même espèce (c'est soit l'oeil droit soit l'oeil gauche qui migre).

 

Photo de face d'un poisson plat dans sa position habituelle (càd couché sur le flanc). Les yeux sont situés sur le même flanc et perpendiculaires à la bouche de l'animal (source : http://www.freewebs.com/oolon/SMOGGM.htm)

Les fossiles de Pleuronectidés adultes étudiés par Friedman montrent une asymétrie du crâne et une migration de l'oeil partielle. Ces caractères ne sont pas le résultat de déformations dues à la fossilisation. Ils illustrent donc une étape intermédiaire dans l'évolution de cette famille. Ils confirment également qu'elle a été graduelle, et non subite comme certains le proposaient.

Les spécimens, Heteronectes chaneti (nouveau genre, nouvelle espèce) et Amphistium, proviennent du site de Bolca, en Italie, et datent de l'Eocène inférieur (45 Ma). Les spécimens d'Amphistium sont soit des morphes dextres (droits) soit des morphes senestres (gauches), ce qui est un caractère primitif. Chez les espèces plus dérivées, c'est l'un des deux morphes qui prédominent, voire est le représentant exclusif, au sein de l'espèce.

Les opposants à l'hypothèse de la migration graduelle de l'oeil chez les poissons plats soutenaient que les formes intermédiaires ne possédaient pas d'avantages. Or comme Friedman le rappelle, les poissons plats actuels se soulèvent régulièrement sur leurs nageoires dorsale et anales lorsqu'ils se mettent en embuscade d'une proie. Chez les formes fossiles, cela leur permettait de repérer leurs proies potentielles d'un oeil, tout en observant les alentours pour surveiller l'arrivée de leurs prédateurs. Leur strabisme a donc pu avoir un avantage sélectif durant un temps, mais regagner une vision binoculaire a fini par supplanter ces formes.

Schéma illustrant la migration de la position de l'oeil au sein de la famille des Pleuronectidés depuis les formes fossiles jusqu'aux formes actuelles (source : http://www.mirror.co.uk)

 




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